Extraits pertinents:

[11] Pour démontrer qu’il n’est pas nécessaire de faire effectuer la transcription écrite des audiences, les procureurs de la Régie invoquent la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information, L.R.Q., c. C-1.1, qui consacre les principes de la neutralité technologique et de l’équivalence fonctionnelle.

[12] Le professeur Claude Fabien explique le sens de ces principes dans La preuve par document technologique (2004) 38 R.J.T. 533. Il décrit, à la page 549, le sens du principe de la neutralité technologique :

[…] Il signifie que le législateur déclare n’avoir aucun parti pris envers une option technologique particulière et qu’il entend traiter sur un pied d’égalité le document papier et le document technologique, sans favoriser l’un au détriment de l’autre. Par conséquent, le justiciable aura la liberté de choisir l’une où l’autre forme de document (art.2), comme support d’une information : il pourra même choisir de mettre la même information sur un document papier et un document technologique et il aura toute liberté d’utiliser l’un ou l’autre, ou les deux simultanément (art.9). L’un n’a pas préséance sur l’autre.

[13] Et, à la page 550, le principe de l’équivalence fonctionnelle :

[…] Deux documents sont équivalents s’ils ont comme fonction de véhiculer la même information, même si leur forme est différente. La loi leur accorde la même valeur juridique : ils produisent les mêmes effets juridiques et sont égaux sur le plan de la preuve. Tel est le sens des articles 5 et 9 de la Loi.

[14] Le Tribunal est favorable à l’utilisation de technologies de l’information surtout lorsqu’elles permettent d’atteindre l’objectif de la LJA qui consiste à assurer la qualité, la célérité et l’accessibilité de la justice administrative.

1. La présente loi a pour objet d'affirmer la spécificité de la justice administrative et d'en assurer la qualité, la célérité et l'accessibilité, de même que d'assurer le respect des droits fondamentaux des administrés.
[...]

[...]
[17] De tous ces motifs, il ressort clairement que les enregistrements audio sont recevables en preuve devant le Tribunal.

[18] Ces enregistrements constituent un élément de preuve facultatif qui vient s’ajouter au dossier que la Régie a l’obligation de transmettre au Tribunal et aux parties requérantes en vertu de l’article 114 LJA.

114. L'autorité administrative dont la décision est contestée est tenue, dans les 30 jours de la réception de la copie de la requête, de transmettre au secrétaire du Tribunal et au requérant copie du dossier relatif à l'affaire ainsi que le nom, l'adresse et le numéro de téléphone et de télécopieur de son représentant.

[…]

L'accès au dossier ainsi transmis demeure régi par la loi applicable à l'autorité administrative qui l'a transmis.

[19] La difficulté soulevée par le dépôt des enregistrements audio est plutôt sur le plan pratique de l’utilisation de ces enregistrements. Plusieurs questions peuvent venir à l’esprit.

[20] Comment une partie va-t-elle identifier les passages qu’elle invoque? Comment retrouver les passages importants d’un témoignage? Comment référer à un mot ou à une phrase précise?

[21] Comment identifier la personne qui parle? Le témoin s’exprime-t-il clairement? Toutes les parties comprennent-elles la même chose?

[22] Il y aura évidemment lieu d'ajuster le déroulement de l’audience à l’utilisation des enregistrements audio et des solutions devront nécessairement être adaptées au contexte de chaque affaire.

[23] D’autre part, même s’il est possible de déposer les enregistrements audio devant le Tribunal, il ne s’agit évidemment pas d’une solution appropriée à toutes les causes.

[24] Ainsi, lorsque d’importants motifs d’un recours se fondent sur des éléments de l’audience devant la Régie, il appartient à la partie qui considère que sa cause serait mieux servie par une transcription écrite de faire effectuer une telle transcription aux fins de son recours devant le Tribunal.


Dernière modification : le 20 novembre 2012 à 12 h 03 min.