Extraits pertinents:

 

[88] Le syndicat requérant prétend que la Commission doit écarter la notification par courriel qui n’est pas pratique. D’abord parce que l’information peut se perdre parmi des « pourriels » et ensuite parce que les parties ne s’attendent pas à recevoir des démissions par ce mode de communication. La Commission considère que l’utilisation des nouvelles technologies est incontournable et que les parties doivent désormais en tenir compte dans le cadre des relations du travail.

[89] Alors que la Loi mentionne expressément que : « Un document peut être transmis, envoyé ou expédié par tout mode de transmission approprié à son support, à moins que la loi n'exige l'emploi exclusif d'un mode spécifique de transmission. » Il faut constater que ni le Code ni le Règlement sur l’exercice du droit d’association conformément au Code du travail, pas plus que Les Règles de preuve et de procédure de la Commission des relations du travail, ne précisent ou n’excluent un mode de signification des démissions dans le cadre d’une campagne de changement d’allégeance syndicale.

[90] En conséquence, la Commission ne peut d’office décider que l’envoi de démissions par courriel doit être prohibé. Tout au plus doit-elle s’assurer, comme l’exige l’article 28 de la Loi, que dans le cas où une partie décide d’utiliser un tel support technologique, que les règles de droit applicables sont respectées.

[91] Il ne fait aucun doute que les démissions, numérisées par le représentant du syndicat intimé et annexées à un courriel constituent un document au sens de l’article 3 de la Loi. De plus, la preuve ne permet pas de remettre en cause l’intégrité des documents numérisés.

[92] La Loi crée à son article 31 des présomptions relatives de transmission lorsque le geste initiant le parcours vers l’adresse du destinataire et de réception lorsque le document devient accessible à son adresse. Ces présomptions ne sont d’aucune utilité ici. Les témoignages des représentants du syndicat intimé et du président du syndicat requérant démontrent hors de tout doute que non seulement les démissions ont été envoyées, mais qu’elles ont aussi été reçues par le syndicat requérant.

[93] La question à déterminer est plutôt : est-ce que les démissions ont été notifiées au syndicat requérant (reçues) au plus tard à minuit le 12 janvier 2011?

[94] Le syndicat requérant prétend que la Commission doit exiger une preuve précise établissant la réception des démissions au plus tard à minuit le jour du dépôt pour conclure à leur validité, ce qu’on ne peut faire, dans le présent cas, avec un rapport d’envoi ou un rapport de lecture, issu de l’ordinateur d’un représentant du syndicat intimé. La Commission partage cet avis.

[95] L’article 31 de la Loi précise que lorsqu’il s’agit de faire la preuve du moment de la réception d’un document, un « accusé de réception » ou la « production des renseignements conservés avec le document lorsqu'ils garantissent les date, heure, minute, seconde de l'envoi ou de la réception et l'indication de sa provenance et sa destination » constituent des moyens de preuve appropriés.

[96] Dans le présent dossier, la Commission ne peut s’appuyer sur le témoignage de monsieur Laflamme pour établir précisément le moment de l’envoi et encore moins de la réception des démissions. D'abord, il n’a pas vérifié si son ordinateur était à l’heure exacte, et, dans son témoignage, il a volontairement omis, dans un premier temps de parler d’une tentative d’envoi de télécopie, parce que le rapport, en apparence, ne servait pas sa cause. Son témoignage apparaît peu fiable dans les circonstances.

[97] Les rapports d’envoi et de lecture issus de l’ordinateur de monsieur Laflamme ne permettent pas de préciser l’heure de réception des courriels. D’autre part, la preuve ne recèle pas d’un rapport de réception issu de l’ordinateur de monsieur Handfield.

[98] Cependant, lorsque ce dernier répond par courriel à monsieur Laflamme le 13 janvier à 11 h 32, il le fait en utilisant la copie du courriel qu’il a reçue. Les informations qui accompagnent le courriel qui s’est imprimé dans sa boîte de messages sont claires, l’en-tête du courriel reçu mentionne la date, l’heure et la minute de la réception; le 12 janvier 2011, à 23 h 45, soit une minute plus tard que l’heure indiquée au rapport d’envoi issu de l’ordinateur de monsieur Laflamme (23 h 44). L’heure indiquée au courriel diffère de celle au rapport d’envoi ou de lecture puisqu’il s’agit d’informations provenant de sources différentes, en l’occurrence, de l’ordinateur de monsieur Handfield président du syndicat requérant. Les informations qui accompagnent la copie du courriel issu de l’ordinateur de monsieur Handfield confirment que les démissions ont été reçues, par le destinataire, le 12 janvier 2011, à 23 h 45.

[99] Mentionnons de plus que le syndicat requérant n’a pas jugé bon de faire une preuve visant à démontrer que son ordinateur n’avait pas la bonne heure. Il y a donc prépondérance de preuve que les démissions ont été notifiées le 12 janvier 2011.


Dernière modification : le 30 septembre 2012 à 15 h 01 min.