Extraits pertinents : [1] La Commission d’accès à l’information (la Commission) est saisie d’une demande de révision du refus de la Régie du logement (l’organisme) de donner accès à sa Banque de références juridiques (BRJ) au motif qu’il s’agit d’un outil interne au service des membres décideurs de l’organisme et qui n’a pas un caractère public. [7] D’abord, la BCD contient toutes les décisions rendues par l’organisme depuis 1999 et est rendue disponible au grand public pour effectuer des recherches dans les bureaux de l’organisme. Depuis 2009, toutes les décisions de l’organisme sont accessibles également sur le site www.jugement.qc.ca diffusé par la Société québécoise d’information juridique (SOQUIJ). [8] La BRJ contient des décisions de l’organisme et des tribunaux judiciaires sélectionnées dont celles antérieures au 31 décembre 1998. [9] La demanderesse précise qu’elle veut pouvoir effectuer une recherche dans l’ensemble des décisions de l’organisme. Pour le moment, elle a accès à celles diffusées dans la BCD mais n’a pas accès aux décisions de la BRJ. [11] La demanderesse explique que certaines décisions se trouvent uniquement dans cette banque, l’originale ayant été détruite conformément au calendrier de conservation. [12] Elle veut donc que toutes les décisions rendues par l’organisme et qu’il détient soient repérables informatiquement et suggère même de verser les décisions de la BRJ dans la BCD. [32] Il n’existe pas d’index papier ou de liste papier des décisions de la BRJ et de la BCD. La consultation de la BRJ se fait uniquement de manière informatique et n’est disponible qu’à l’interne. [33] En contre-interrogatoire, le témoin explique que, si elle devait verser les décisions de la BRJ dans la BCD, elle aurait besoin des fichiers électroniques. Cela nécessiterait de la programmation et un traitement manuel. Une analyse de faisabilité devrait être faite. [40] Pour démontrer la difficulté d’obtenir des décisions, la demanderesse explique les différentes démarches qu’elle a effectuées pour que l’organisme retrouve finalement la décision Jassinger dans la BRJ. Elle a dû fournir plusieurs informations à l’organisme, ce qui a permis de retrouver la décision de la BRJ (D-3 et D-4). Elle souligne qu’il est étonnant que le personnel de l’organisme n’ait pas été en mesure de retrouver cette décision lorsqu’elle l’a demandée. [42] Selon elle, l’affaire Jassinger, concernant l’octroi des frais judiciaires, est citée plus de 1 000 fois et n’est pas disponible ailleurs que dans la BRJ. Cette situation amène selon elle une jurisprudence incohérente. Elle dépose un extrait d’une décision de l’organisme (D-2)[6]. [51] Le témoin explique qu’avant l’arrivée de l’informatique, les décisions étaient dactylographiées par les secrétaires des régisseurs et transmises au contentieux pour relecture. À cette occasion, certaines décisions d’intérêt étaient remises à la personne responsable de la sélection. [52] La sélection des décisions était nécessaire. À ce jour, il y aurait 1 061 000 décisions rendues par l’organisme. Encore aujourd’hui, l’organisme est le tribunal administratif qui rend le plus de décisions par année. [53] Avec l’arrivée de l’informatique et pour faciliter la recherche, l’organisme a décidé de créer une banque interne, la BRJ. Ainsi, toutes les décisions de l’organisme qui avaient été sélectionnées et publiées ainsi que les décisions d’intérêt des tribunaux supérieurs ont été retranscrites et déposées dans la BRJ. [64] La demanderesse désire avoir accès aux décisions de l’organisme contenues dans la BRJ et qui ne sont pas dans la BCD, soit 10 592 décisions. [65] L’organisme ne refuse pas l’accès à ses décisions contenues dans la BRJ. Il détient cette banque et accepte de communiquer copie des décisions demandées lorsqu’elles sont identifiées. Ce qu’il refuse, c’est de permettre l’accès à cette banque qui se trouve dans ses bureaux et qui n’a pas été conçue à cette fin. [69] L’article 3 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information[9] définit ainsi la notion de document dans un contexte technologique : 3. Un document est constitué d'information portée par un support. L'information y est délimitée et structurée, de façon tangible ou logique selon le support qui la porte, et elle est intelligible sous forme de mots, de sons ou d'images. L'information peut être rendue au moyen de tout mode d'écriture, y compris d'un système de symboles transcriptibles sous l'une de ces formes ou en un autre système de symboles. Pour l'application de la présente loi, est assimilée au document toute banque de données dont les éléments structurants permettent la création de documents par la délimitation et la structuration de l'information qui y est inscrite. Un dossier peut être composé d'un ou de plusieurs documents. Les documents sur des supports faisant appel aux technologies de l'information visées au paragraphe 2° de l'article 1 sont qualifiés dans la présente loi de documents technologiques. [70] La BRJ est un document technologique visé par la Loi sur l’accès. Elle contient de l’information délimitée et structurée[10], soit des décisions de tribunaux judiciaires et de l’organisme. Seules ces dernières sont visées par la demande d’accès. [73] Selon la preuve, la banque ne contient pas de renseignements personnels qui pourraient être confidentiels ou d’autres renseignements qui pourraient être visés par une autre restriction au droit d’accès prévue à la Loi sur l’accès. D’ailleurs, aucune restriction n’a été soulevée par l’organisme. [76] La demanderesse soutient que l’intérêt public devrait primer dans la présente affaire et favoriser la diffusion de cette banque. À cet égard, la Commission a plusieurs fois réitéré le rôle que la Loi sur l’accès attribue à la Commission et à la portée de son intervention qui sont limités, notamment dans les affaires D.T. c. Secrétariat du Trésor[11] : [42] D’abord, la Commission rappelle que l’intérêt du demandeur ou d’un groupe de personnes n’a pas à être pris en compte lorsqu’elle statue sur une demande de révision. Lors de l’adoption de la Loi sur l’accès, le législateur a prévu un droit d’accès pour toute personne aux documents détenus par les organismes publics dans l’exercice de leurs fonctions, sans égard à leur intérêt ou à leur statut. [43] Ce droit d’accès n’est pas tributaire de l’intérêt du demandeur ou d’un autre groupe d’individus ni de la société en général. [79] L’organisme souligne qu’il y a plus d’un million de décisions déjà en ligne dans la BCD. Cependant, la demande d’accès de la demanderesse doit s’évaluer à la lumière des dispositions de la Loi sur l’accès. [82] En l’espèce, la Commission doit se prononcer sur l’exercice du droit d’accès à des documents structurés et intelligibles, à caractère public, contenus dans une banque de données détenue par un organisme public assujetti à la Loi sur l’accès. [84] Pour les motifs énoncés précédemment, la Commission conclut que la demande d’accès identifiant les décisions de l’organisme contenues dans la BRJ de 1981 à 1999 est suffisamment précise. Rien dans la loi ne permet d’exiger d’identifier chaque document contenu dans une banque. [90] Il appartient à l’organisme de moduler l’application des articles 11 et 13 de la Loi sur l’accès pour permettre à la demanderesse de consulter sur place la banque demandée ou de lui fournir une copie de cette banque ou une copie des décisions demandées en format électronique. [91] La demanderesse ne peut dicter à l’organisme la manière dont il devrait diffuser ses décisions. C’est l’organisme qui choisit le moyen de faire connaître sa jurisprudence. [95] POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [96] ACCUEILLE EN PARTIE la demande de révision. [97] ORDONNE à la Régie du logement de permettre à la demanderesse de consulter les 10 592 décisions dont 1 937 ont fait l’objet d’une publication dans un recueil de jurisprudence conformément aux articles 10 et 13 de la Loi sur l’accès, et ce, dans les 30 jours de la réception de la présente décision. [98] REJETTE QUANT AU RESTE la demande de révision. Dernière modification : le 8 mars 2017 à 15 h 12 min.