Extraits pertinents : [1] La Commission d’accès à l’information (la Commission) est saisie d’une demande de révision du refus de la Commission de la construction du Québec (l’organisme) de communiquer certaines données dont la production nécessiterait des comparaisons de données. [4] Me Charette a reçu la demande d’accès visant différentes données sur la mobilité interprovinciale des travailleurs et des entreprises de la construction et sur la détention de certains certificats. Le témoin connaît bien le demandeur qui a occupé la fonction de directeur de la recherche pour l’organisme pendant plusieurs années. [7] Me Charette s’adresse alors à la direction de la recherche pour savoir si un document répondant à la demande existe. Il souligne que l’organisme produit énormément de statistiques, d’indicateurs, de tableaux et de rapports divers, et ce, périodiquement. Ces documents font aussi l’objet d’une diffusion sur le site internet de l’organisme. [8] Si la réponse est négative, la position de l’organisme est de ne pas produire un nouveau document et le refus est fondé sur l’article 15 de la Loi sur l’accès qui permet à l’organisme de ne pas constituer de nouveaux documents pour répondre à une demande d’accès. [10] En l’espèce, la demande était claire. Il a vérifié auprès de M. Charles Morissette, directeur de la direction de la recherche de l’époque, qui lui a confirmé que de fournir les renseignements demandés nécessiterait une opération complexe, soit de constituer un document à partir d’un ensemble de données contenues dans les systèmes. [19] Le témoin explique que l’organisme a constaté qu’il recevait beaucoup de demandes ad hoc des organismes patronaux, syndicaux ainsi que des grands groupes de recherche comme SECOR qui veulent obtenir différentes statistiques ou données de toutes sortes sur l’industrie de la construction. Par exemple, la préparation des négociations dans le secteur de la construction amenait beaucoup de demandes. [20] L’organisme a choisi de resserrer le traitement des données et de miser sur ce qui existe déjà et d’éviter de traiter de nouvelles informations. [21] Elle confirme que l’équipe de recherche a l’expertise pour produire ce genre de données, mais considérant tous les enjeux, l’organisme s’est positionné et a décidé de refuser les demandes de statistiques ad hoc présentées par des tiers. [28] Elle explique que l’organisme rend disponibles beaucoup de données sur son site internet. Argumentations [47] L’organisme soutient que la compétence de la Commission porte sur la décision du responsable. En l’espèce, le demandeur a obtenu les informations qui lui ont permis de produire son rapport. Il n’est pas de la compétence de la Commission de prononcer un jugement déclaratoire sur cette pratique de l’organisme. [49] En l’espèce, l’organisme ne détient pas le document, mais un ensemble de données contenues sur des supports informatiques (cubes). [50] L’article 15 de la Loi sur l’accès s’applique si l’organisme ne détient pas le document et qu’il faut, pour répondre à la demande, retracer, extraire ou compiler des données. Selon l’organisme, la preuve a démontré que la demande d’accès nécessite le croisement, le couplage et l’agglomération de données. [51] Si la demande nécessite la création d’un nouveau document, il appartient au responsable de l’accès d’exercer sa discrétion. L’organisme s’est plutôt positionné quant aux demandes de tiers qui nécessitent la création d’un nouveau document. ANALYSE [66] En l’espèce, il n’est pas contesté que l’organisme détient, dans ses entrepôts de données, des renseignements de la nature ou se rapportant à ceux demandés. [67] L’organisme soutient qu’il ne détient pas de document répondant à cette demande et qu’il n’a pas à en produire un en vertu des articles 1 et 15 de la Loi sur l’accès qui prévoient : 1. La présente loi s’applique aux documents détenus par un organisme public dans l’exercice de ses fonctions, que leur conservation soit assurée par l’organisme public ou par un tiers. Elle s’applique quelle que soit la forme de ces documents: écrite, graphique, sonore, visuelle, informatisée ou autre. 15. Le droit d’accès ne porte que sur les documents dont la communication ne requiert ni calcul, ni comparaison de renseignements. [68] Le demandeur, pour sa part, soutient que l’organisme a une interprétation limitative de la notion de document, qui inclue un fichier de données. Ce qui est en cause selon lui, c’est l’interprétation abusive de la notion de manipulation de données, pour créer un document, que fait l’organisme. Notion de document [69] La Loi sur l’accès s’applique aux documents détenus par les organismes publics quelle que soit la forme de ces documents, informatisée ou autre. [70] Les articles 3 et 4 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information[6] définissent la notion de document comme suit : 3. Un document est constitué d’information portée par un support. L’information y est délimitée et structurée, de façon tangible ou logique selon le support qui la porte, et elle est intelligible sous forme de mots, de sons ou d’images. L’information peut être rendue au moyen de tout mode d’écriture, y compris d’un système de symboles transcriptibles sous l’une de ces formes ou en un autre système de symboles. Pour l’application de la présente loi, est assimilée au document toute banque de données dont les éléments structurants permettent la création de documents par la délimitation et la structuration de l’information qui y est inscrite. Un dossier peut être composé d’un ou de plusieurs documents. Les documents sur des supports faisant appel aux technologies de l’information visées au paragraphe 2° de l’article 1 sont qualifiés dans la présente loi de documents technologiques. 4. Un document technologique, dont l’information est fragmentée et répartie sur un ou plusieurs supports situés en un ou plusieurs emplacements, doit être considéré comme formant un tout, lorsque des éléments logiques structurants permettent d’en relier les fragments, directement ou par référence, et que ces éléments assurent à la fois l’intégrité de chacun des fragments d’information et l’intégrité de la reconstitution du document antérieur à la fragmentation et à la répartition. Inversement, plusieurs documents technologiques, même réunis en un seul à des fins de transmission ou de conservation, ne perdent pas leur caractère distinct, lorsque des éléments logiques structurants permettent d’assurer à la fois l’intégrité du document qui les réunit et celle de la reconstitution de chacun des documents qui ont été ainsi réunis. Création d’un nouveau document [75] En l’espèce, la preuve présentée permet de conclure que la demande d’accès, telle que formulée, implique davantage qu’une simple requête dont le résultat serait transféré dans un fichier Excel[7]. [76] Les entrepôts de données sont constitués de « cubes » qui regroupent certaines données, mais il ressort de la preuve que la demande d’accès nécessite une comparaison des données, un couplage et une agglomération de ces données. [78] Il n’en demeure pas moins que le document recherché n’est pas détenu et que pour le produire il faut effectuer des comparaisons et de l’analyse. La Commission en conclut donc que l’article 15 de la Loi sur l’accès trouve application en l’espèce. [79] À cet égard, l’organisme cite l’extrait suivant de la décision M.L. c. Ville de Repentigny et conclut qu’il appartient à l’organisme d’exercer sa discrétion de produire ou non un nouveau document : [96] Par ailleurs, bien que la Loi sur l’accès n’oblige pas un organisme à effectuer une comparaison de renseignements pour répondre à une demande d’accès [art. 15], la Commission souligne qu’en comparant la liste des chèques émis au nom de Dunton, Rainville aux comptes d’honoraires déposés sous pli confidentiel, elle a pu rapidement identifier les chèques correspondants. Cet exercice n’a pris que quelques minutes pour une période de deux années. En conséquence, si l’organisme souhaite donner un portrait plus complet et exact des montants payés dans chacun des dossiers visés par les demandes d’accès pour chacun des fournisseurs, il peut donc choisir d’identifier ces montants dans la liste de chèques de chaque fournisseur et masquer les autres montants que contiennent ces documents, bien que la Loi sur l’accès ne l’y oblige pas. POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION : [81] REJETTE la demande de révision. Dernière modification : le 8 mars 2017 à 14 h 50 min.