Extrait pertinent: [8] La Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information[1] (L.C.C.J.T.I.) énonce aux articles 28 et 74 : Un document peut être transmis, envoyé ou expédié par tout mode de transmission approprié à son support, à moins que la loi n'exige l'emploi exclusif d'un mode spécifique de transmission. Lorsque la loi prévoit l'utilisation des services de la poste ou du courrier, cette exigence peut être satisfaite en faisant appel à la technologie appropriée au support du document devant être transmis. De même, lorsque la loi prévoit l'utilisation de la poste certifiée ou recommandée, cette exigence peut être satisfaite, dans le cas d'un document technologique, au moyen d'un accusé de réception sur le support approprié signé par le destinataire ou par un autre moyen convenu. Lorsque la loi prévoit l'envoi ou la réception d'un document à une adresse spécifique, celle-ci se compose, dans le cas d'un document technologique, d'un identifiant propre à l'emplacement où le destinataire peut recevoir communication d'un tel document. 74 L'indication dans la loi de la possibilité d'utiliser un ou des modes de transmission comme l'envoi ou l'expédition d'un document par lettre, par messager, par câblogramme, par télégramme, par télécopieur, par voie télématique, informatique ou électronique, par voie de télécommunication, de télétransmission ou au moyen de la fibre optique ou d'une autre technologie de l'information n'empêche pas de recourir à un autre mode de transmission approprié au support du document, dans la mesure où la disposition législative n'impose pas un mode exclusif de transmission. [9] Au sujet de l'interaction entre l'application de l'article 123 C.p.c.[2] et de L.C.C.J.T.I., pour l'utilisation du courriel comme mode de signification, les auteurs Me Jean-François De Rico et Me Dominique Jaar écrivent : Comme son nom l'indique, la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information est une loi « chapeau» qui a amendé nommément plusieurs lois, mais qui a aussi eu pour effet d'amender toutes lois qui traitent de documents et de modes de transmission, incluant le C.p.c. Le législateur a été précurseur en comprenant que l'avènement des TI et la vitesse de leur évolution ne permettraient pas d'amender chacune des lois à chaque avancée technologique. Ainsi, il a favorisé un cadre juridique général qui chapeaute toutes les lois pertinentes pour éviter de recourir à l'amendement législatif de ces dernières. Il nous semble justifié d'appliquer les dispositions de la L.C.CJ.T.I. aux articles concernant la signification dans le Code de procédure civile. Rappelons que le principe juridique à la base de la signification est en fait « la remise d'une copie de l'acte à l'intention de son destinataire» (123 C.p.c.). Selon l'article 28 L.C.C.J.T.I., cette remise peut être effectuée « par tout mode de transmission approprié à son support, à moins que la loi n'exige l'emploi exclusif d'un mode spécifique de transmission». Notons que la seule exception à l'article 28 L.C.CJ.T.I. tient dans l'exigence législative d'un mode exclusif de transmission. Or, à la lecture des articles 123 et 140.1 C.p.c., on constate l'usage du mot « peut» qui dénote une possibilité, i.e. tout le contraire d'une obligation exclusive. Considérant que le Code de procédure civile ne prévoit pas de mode exclusif de transmission pour effectuer une signification, retenant plutôt plusieurs modes (huissier, poste, télécopieur, etc.), nous croyons que l'article 28 L.C.CJ.T.I. peut recevoir pleine application et ainsi permettre au courriel d'être utilisé comme mode de signification.[3] […] [10] Le Tribunal partage l'avis de ces auteurs et estime que le même raisonnement pour l'usage du courriel comme mode de signification est aussi applicable pour une signification par Facebook. [11] L'article 31 de la L.C.C.J.T.I. encadre les modalités de la preuve d'une telle signification. [12] Nous sommes ici devant une situation où la partie demanderesse a tenté sans succès de faire signifier, en vertu des dispositions de l'article 137 C.p.c., la requête introductive d'instance à la défenderesse à sa dernière adresse connue en Floride. [13] Le seul moyen dont dispose la demanderesse pour transmettre à la défenderesse la requête introductive d'instance est par l'intermédiaire de son adresse Facebook. En effet, il s'agit d'un moyen direct et pratique d'aviser la défenderesse que des procédures sont entreprises contre elle afin qu'elle puisse préparer sa défense et d'être entendue, ce qui rencontre le principal but de la signification. [14] Pour les motifs exprimés précédemment, l'article 28 de la L.C.C.J.T.I. permet l'utilisation de ce mode de signification. [15] Le Tribunal tient compte que la partie demanderesse sera en mesure de faire la preuve de la signification de la requête introductive d'instance par la voie de Facebook[4]. [16] L'ensemble de ces facteurs amène le Tribunal à conclure que les critères sont rencontrés pour autoriser la signification de la requête introductive d'instance à l'adresse de la défenderesse sur Facebook, et ce, en application de l'article 138 C.p.c.[5] ” Dernière modification : le 15 août 2012 à 11 h 53 min.